Description
Avignon et le Comtat Venaissin en 1791 :
un débat révélateur à l’Assemblée Constituante
Malgré le fait qu’elle n’éclata qu’au printemps de 1791 et plus précisément avec le vote du 4 mai, l’affaire d’Avignon a traîné tout au long de l’Assemblée constituante. Un an plus tôt, les premiers affrontements de force entre les divers partis se produisirent dans le Sud : à Paris, l’Assemblée traversait une époque optimiste alors que l’avenir semblait clair. En 1791, dans le Sud, la situation empirait à Paris, l’Assemblée perdait son unanimité d’opinion et se trouvait de plus en plus livrée aux rumeurs et aux complots. L’affaire d’Avignon traverse les deux années de la Constituante comme un indicateur-témoin de la difficulté à effectuer une révolution en douceur : la révolution modérée qui fut le vœu de la France de 1789, la France des Lumières.
Écoutons Michelet : « Avignon et le Comtat offraient déjà (en 1791) une atroce miniature de nos guerres civiles imminentes. La première, fortifiée de tout ce qu’il y avait d’ardents révolutionnaires à Nîmes, Arles, Orange, guerroyait contre Carpentras, le siège de l’aristocratie. Guerre barbare des deux côtés, de vieilles rancunes envenimées de fureurs nouvelles, moins une guerre qu’une scène horriblement variée d’embûches et d’assassinats. Les lenteurs de l’Assemblée nationale y étaient pour beaucoup, on devait l’en accuser, et la fatale proposition de Mirabeau d’ajourner la décision. Elle n’arriva que le 4 mai, et encore, ne décida rien. L’Assemblée déclarait qu’Avignon ne faisait point partie intégrante de la France, sans toutefois que la France renonçât à ses droits. Ce qui revenait à dire : « L’Assemblée juge qu’Avignon n’appartient pas, sans nier qu’elle appartienne. »
Que voulait-on dire par l’affaire d’Avignon ? Territoire sous la juridiction du Pape depuis quatre siècles et plus. Avignon avait été vendue par la reine Jeanne de Naples en 1348. Louis XIV et puis Louis XV l’avaient reprise pour des périodes brèves, mais chaque fois elle fut restituée à l’autorité papale. Dès 1789, une partie de ses habitants, le parti réformiste, cherchait à revenir sous l’empire français pour profiter des temps nouveaux. Le 21 novembre 1789. lorsque Charles-François Bouche, avocat au Parlement d’Aix, représentant les députés de Provence, renouvelle sa motion pour la restitution de l’État d’Avignon et du Comtat-Venaissin, l’Assemblée nationale ne fait qu’autoriser l’impression de son mémoire. Si tout de suite, la Constituante avait donné son accord, il est probable que la question aurait été réglée plus vite. Comme si souvent, elle tergiversa. Le 12 juin 1790, à la suite des émeutes, les habitants ou une partie d’entre eux votent leur union avec la France. Le mois suivant, ils envoient une délégation participer aux fêtes du 14 juillet à Paris. Le comité d’Avignon, composé de six membres, est nommé par l’Assemblée nationale le 17 juillet. En fait, seulement trois d’entre eux assistent aux réunions Bouche, Démeunier et Tronchet. Quand Démeunier tombe malade, le travail est fait par les deux autres. Quand l’Assemblée critique cette situation, quatre nouveaux membres sont ajoutés au comité mais aucun d’eux ne s’intéresse vraiment à la question. A la fin du mois d’août, Tronchet fait son rapport et une discussion sérieuse est entamée, animée par Bouche, Malouet et Rabaut de Saint-Etienne. Elle se poursuit en octobre. La Constituante continue d’hésiter devant la protestation du Pape, dune part, et devant l’entorse au droit international d’autre part. Parce que le Régime est nouveau et parce que l’on cherche à heurter le moins possible les intérêts divers, surtout à l’étranger, la Constituante ne réussit pas à prendre une décision dans un domaine où, avant 1789, Louis XVI aurait pu, comme ses prédécesseurs, agir sans soulever trop de protestations. L’Assemblée hésite parce qu’elle est dominée par une majorité modérée dont Démeunier est le porte-parole et Mirabeau l’orateur. A son instigation, le 20 novembre 1790, l’Assemblée adopte un décret qui ajourne la délibération […]
Informations complémentaires
Année de publication | 1985 |
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Nombre de pages | 6 |
Auteur(s) | Edna LEMAY |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |