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Description

Autour de la mort de Crebillon

[texte complet]

L’on sait les circonstances de la mort et des obsèques de Molière. On lira avec curiosité les difficultés que, près d’un siècle plus tard, la Comédie Française connut pour honorer Crebillon d’un service religieux. La relation ci-dessous est un extrait d’une lettre adressée par Jean-Etienne de COURT, fils de Jean Joseph de COURT, janséniste piscénois (cf. X. Azéma Jean Joseph de COURT et les siens, à paraître dans Études sur Pézenas et sa région). La lettre est datée de Paris, le 24 juillet 1762 ; elle est adressée à l’abbé du PAC de Bellegarde, à Rhynvick aux Pays-Bas, et fait partie du Fonds janséniste des Archives Provinciales d’Utrecht, N° 26.

« … Crebillon est mort dans le sein de l’Église ayant reçu les sacrements avant de mourir quoiqu’il eut passé les cinquante dernières années de sa vie sans faire aucun exercice de religion. Après sa mort, il a beaucoup été loué parce qu’il a fait beaucoup de tragédies qui sont, dit-on, fort belles ; car je suis si étranger dans la littérature que je ne les connois point. Il était de plus le censeur de la police pour les spectacles. Quoiqu’il en soit, il a été enterré en terre sainte et il n’y a rien à dire en tout cela ; l’église ne refuse point ces sortes d’honneurs à ceux qui meurent dans sa communion. Mais voilà la grande affaire. Les comédiens français ont voulu lui faire un service solennel auquel ils ont prétendu assister en personne, quoique la plupart d’entre eux ne croye point au purgatoire. Ils se sont adresséz au curé de St Eustache qui l’a refusé. On prétend qu’ils se sont ensuite adresséz au curé de St Sulpice et à plusieurs autres qui les ont refusez. Il y a six mois que voulant faire un service pour Mlle Cogère, une de leur actrice, ils le firent faire aux Ursulines de la rue St Jacques. Mr l’Archevêque le sut, réprimanda le chapelain et la supérieure. Cette fois-ci, ils ont trouvé le curé de St Jean de Latran. Cette paroisse est hors de la juridiction de l’ordinaire. Le curé s’est cru maître ; les comédiens ont tous été à l’offrande ; la Gazette de Paris a fait l’éloge du mort, des comédiens, du curé et des services. L’ordre de Malthe en a jugé autrement ; le bailli de Morée, Mr Destournel, commandeur de St Jean de Latran a assemblé un conseil de l’Ordre chez Mr l’ambassadeur. Ce conseil, composé de six chevaliers et de six avocats, présidé par ce bailli, a condamné le curé a deux cents francs d’aumône, et à trois mois de pénitence dans une maison de retraite de l’Ordre qui lui sera indiqué par le grand maître ».

Xavier AZÉMA

Informations complémentaires

Année de publication

1973

Nombre de pages

1

Auteur(s)

Xavier AZEMA

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf