Présentation de la publication
Les structures du ministère de l’Information
en Languedoc-Roussillon à la Libération
La direction régionale de Montpellier (1944–1947)
Yves Guillauma
Résumé :
Pour prendre immédiatement en main les destinées du pays au fur et à mesure de sa libération, sans attendre l’arrivée du général de Gaulle et des membres du gouvernement sur le sol national, le Comité Français de Libération Nationale (CFLN) avait, à l’instigation de la Résistance intérieure, nommé sous l’Occupation des personnalités appelées à diriger les différentes provinces en son nom. Pour toutes les questions concernant l’information, la presse et le cinéma, ces personnalités furent appelées des commissaires puis des directeurs régionaux à l’Information. Cet article étudie la mise en place et la vie de la direction régionale de Montpellier, avant qu’elle ne soit, pour des raisons budgétaires, absorbée par la direction interrégionale de Toulouse en novembre 1945.
Les derniers mois de l’Occupation, alors que les perspectives d’une victoire militaire sur les Allemands commençaient à se dessiner, le Gouvernement d’Alger commença à se préoccuper de ce qui allait se passer dans le pays, une fois la libération acquise. Il lui fallait notamment mettre en place une nouvelle administration, sous peine de se faire voler la victoire. Car, dans ce contexte de fin des hostilités, il n’était nullement assuré que le Général de Gaulle puisse, avec son gouvernement, faire partie de la tête de pont lancée au moment du débarquement et commencer à diriger le pays, comme si l’on était en temps de paix. Il était facile d’imaginer que les Allemands combattraient jusqu’au bout pour empêcher la renaissance des institutions démocratiques dans le pays. Il fallait aussi faire obstacle aux projets des Alliés sur ce point. A partir de 1943, les Etats-Unis avaient commencé à réfléchir à un gouvernement militaire des territoires occupés, l’Allied Military Government of Occupied Territories (AMGOT), qu’ils souhaitaient mettre en place au fur et à mesure de la libération des départements et qui devait occuper le terrain jusqu’à la tenue d’élections libres. Dans leur communication au colloque de Caen, Michèle et Jean-Paul Cointet ont également montré que « Vichy, sur sa fin, a bel et bien tenté une ultime opération de continuité et de transmission du pouvoir ». Restait enfin l’inconnue de la Résistance intérieure, noyautée par le Parti communiste et le Front National.
C’était là une perspective dont ne voulait à aucun prix le général de Gaulle. Il entendait prendre en main l’administration de la France dès la Libération. Un point de vue qui était d’autant plus partagé par la Résistance intérieure qu’elle avait réfléchi, de son côté, aux modalités de sa mise en œuvre bien avant le débarquement. Dans un rapport daté du 10 octobre 1943 qu’il avait adressé à Alger, Claude Bouchinet-Serreulles, alors délégué civil pour la Zone Nord, avait déjà fait savoir à Alger que « d’accord avec le Comité Général d’Etudes (CGE), nous pensons que dès à présent des administrateurs provisoires doivent se préparer à la prise en main des ministères de l’Intérieur, de la Justice, de l’Économie (y compris Ravitaillement et Transports), du Travail et de l’Information. Si là encore, les événements nous surprennent avant que soient parvenues les décisions d’Alger, ces “administrateurs provisoires ”doivent être en mesure d’assurer, sur-le-champ, la direction de ces départements ». [...]