Description
Le voyage du navire négrier Le Languedocien
* Adjoint principal du Patrimoine, Archives départementales de l’Hérault
En 1717, une raffinerie de sucre est créée à Sète par une compagnie de négociants, armateurs et financiers montpelliérains, la maison Gilly frères. Elle va tenter de concurrencer les armateurs marseillais dans le trafic avec les colonies d’Amérique en développement principalement un commerce en droiture avec les Antilles, mais aussi en expérimentant la traite négrière à l’occasion du voyage du vaisseau Le Languedocien, entre 1726 et 1728. Cependant, cette expérience souffre d’une baisse soudaine des cours du sucre, de la concurrence des raffineurs bordelais et marseillais, et du manque de soutien des États de Languedoc aux initiatives montpelliéraines.
The journey of the slave ship « The Languedocian » to the coasts of Guinea, The American colonies and Sète 1726-1728
In 1717, a sugar refinery was established in Sète by a company of Montpellier merchants, shipowners and financiers, the Gilly Brothers. It was trying to compete with the Marseille shipowners in the transport with the American colonies, mainly developing the direct trade with the West Indies, but also by experimenting with the slave trade during the voyage of the ship Le Languedocien, between 1726 and 1728. However, this trial-run suffered from a sudden drop in sugar prices, competition from Bordeaux and Marseille refiners, and the lack of support from the Etats de Languedoc for initiatives originating in Montpellier.
Lo viatge del naviri negrièr « Lo Lengadocian » cap a las còstas de Guinèa, las colonias d’America e Seta en 1726-1728
La convocacion dels Estats generals en 1789, puèi lo periòde revolucionari dobrisson una pontannada de cambiaments politics e socials que se perseguisson dins tot lo sègle XIX. Cambiaments qu »an una portada considerabla sus l’implicacion de las gents d’Erau dins la politica locala e nacionala e estrenan la practica electorala. Pels òmes del sègle XIX, marcats per la succession de pas mens de sèt regims diferents, saique foguèt pas aisit d’encapar lor participacion novèla a la vida publica e politica amb de modalitats de longa cambiadissas. L’objècte d’aquesta contribucion es de mostrar, pel biais de documents conservats als Archius departamentals d’Erau, las evolucions del sufragi e las modalitats electoralas dins aquel periòde.
La pratique de la traite négrière par des ports méditerranéens est méconnue. Pourtant le commerce triangulaire a connu un fort développement à Marseille, et Sète l’a expérimenté brièvement. Le voyage du navire négrier Le Languedocien témoigne de l’intérêt des grands négociants montpelliérains pour la traite et le commerce colonial.
Les ambitions commerciales du nouveau port languedocien
En 1666, le pouvoir royal crée le port de Sète afin de doter Montpellier et le Languedoc du grand site portuaire que nécessitaient leurs activités économiques. Dès la fin du XVIIe siècle, le port reçoit des laines et cotons du Levant, mais aussi du bois, du riz et de l’huile d’Italie et de Sardaigne, les deux liaisons principales de Sète. Les bateaux viennent également d’Espagne (cochenille, vermillon, bois, grains et huile), de Sicile et de Barbarie (grains), de Hollande et des pays nordiques (poivre, cannelle, garance, houille, plomb). Le port exporte les draps du Languedoc, et surtout les vins et eaux-de-vie produits dans l’arrière-pays.
Les affaires restent modestes, le port de Sète échouant à concurrencer Marseille au Levant ; néanmoins, il s’impose comme le seul rival du géant marseillais en Languedoc.
Les négociants montpelliérains vont tenter de prendre l’avantage sur Marseille en orientant leurs activités vers le grand commerce antillais, profitant d’un arrêt du 1er décembre 1716 qui admet Sète au nombre des treize ports privilégiés pour le trafic avec les Antilles, et de l’exclusion provisoire des Marseillais du commerce d’Amérique à la suite de la peste de 1720. Le retour à la navigation sûre après la paix d’Utrecht et l’expérience de Law encouragent ces initiatives et renforcent les ambitions des milieux financiers montpelliérains.
Arnel et Jacques Gilly, frères de Simon Gilly, député du commerce du Languedoc et directeur de la Compagnie des Indes à partir de 1718, associés à François Angelin, Moïse Marguerit, ancien capitoul de Toulouse, et Bernard Dufau, tous négociants protestants montpelliérains, concluent, en février 1717, un traité avec les États de Languedoc, pour une durée de quinze années, établissant une raffinerie de sucre à Sète, qui obtient en octobre 1718 le titre de manufacture royale. Les intéressés de la raffinerie s’engagent à importer et à raffiner annuellement 8 000 quintaux de sucre brut, et à expédier aux Antilles la même quantité « de vin du cru et des étoffes des fabriques de la province ». Le sucre raffiné à Sète doit par la suite être vendu à la foire de Beaucaire. Les États leurs octroient une subvention annuelle de 4 000 livres, plus une gratification de 10 000 livres, à raison de 25 sols par quintal de sucre importé, pour couvrir la location des maisons qu’ils ouvrent pour ce commerce à Sète, à Montpellier, à la Martinique et à Saint-Domingue. La maison Gilly frères établit une succursale au Cap-Français nommée Bonnaud et Gilly, en relation avec Eustache, un négociant du Havre. Le nouvel établissement se développe rapidement, soutenu par les importants profits générés par les multiples activités des Gilly (manufactures de draps, importation de piastres de Cadix, banque). Les associés constituent un fonds de capital de 560 000 livres qu’ils emploient au recrutement d’ouvriers-raffineurs en Hollande, à la construction de la nouvelle raffinerie sétoise, une des plus importante d’Europe, et à l’achat de quatre vaisseaux pour assurer les liaisons entre Sète et les colonies. Ils font d’abord l’acquisition du Ville-de-Cette, en 1717, puis celle de l’Américain-de-Languedoc, en 1718, du Saint-Jacques, un 300 tonneaux construit à Amsterdam, en 1719. Le Ville-de-Cette, perdu en mer en 1725, est remplacé par Le Languedocien, un vaisseau d’environ 400 tonneaux, construit à la demande des Gilly près de Hambourg, en 1726, pour 11 000 marks.
Les Gilly et leurs associés s’engagent en 1717 pour armer principalement des vaisseaux effectuant un commerce en droiture avec les colonies, mais ils vont aussi faire l’expérience du commerce triangulaire. À cet effet, ils sollicitent les services de négociants et de gens de mer des ports de l’Atlantique, rompus depuis longtemps à la navigation au long cours et connaisseurs des pratiques de la traite négrière. En 1726, les Gilly s’associent à la maison veuve Le Chibelier et fils, du Havre, expéditrice de charbon pour la raffinerie sétoise, pour armer un vaisseau, Le Languedocien, et aller pratiquer la traite en Guinée. Le commandement est confié au capitaine François Légier, de Toulon, qui a déjà commandé plusieurs expéditions de traite pour le compte des Compagnies du Sénégal et des Indes. La cargaison du bâtiment se compose de cauris, de cuivre, de barres de fer et d’autres marchandises d’une valeur de 50 000 livres ; aux coûts du fret s’ajoutent ceux de l’achat du vaisseau et de son armement, pour un total de 80 000 livres.
Le voyage du Languedocien vers la Guinée et les Antilles est en partie documenté par les registres de l’Amirauté de Sète et de Montpellier conservés aux Archives départementales de l’Hérault. […]
Informations complémentaires
Année de publication | 2020 |
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Nombre de pages | 9 |
Auteur(s) | Nicolas GIBERT |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |