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Description

Parmi les traditions de gestion municipale locale :
la conduite du tirage au sort pour la milice.

Le cas de la communauté de Lavérune au diocèse de Montpellier, 1780-1788

Lorsqu’on évoque la gestion municipale en bas Languedoc à la veille de la Révolution, on pense surtout au rôle d’intermédiaire que consuls et conseil politique jouaient entre leurs compatriotes et le pouvoir royal. Bien sûr, les élus locaux géraient aussi les biens communaux et conduisaient l’administration publique de leur paroisse. Mais il semble qu’ils devaient, le plus souvent, faire connaître, puis exécuter les demandes du subdélégué du diocèse civil, parlant au nom de l’intendant, autant dire du roi. En sens contraire, plus rarement et toujours respectueusement, ils faisaient part au subdélégué des opinions et des difficultés de leurs administrés. La répartition à chacune des charges et leur exécution étaient une tâche ingrate, demandant un certain courage, du doigté et un minimum d’aisance économique aussi, car les consuls engageaient parfois leur propre crédit pour la communauté.

Quant on pense aux obligations déplaisantes des responsables d’une communauté : perception des contributions, répartition des corvées ou des prestations, etc. (1), il est rare que l’on s’intéresse à celles qui relèvent du service de milice, pourtant si impopulaire que sa suppression figure dans la plupart des cahiers de doléances de 1789. C’est pourquoi il nous a paru intéressant de rappeler quelques éléments de cette obligation à l’échelon d’une communauté rurale des environs de Montpellier entre 1780 et 1788.

Une première précision s’impose : cette communauté, Lavérune, située à six kilomètres au sud-ouest de Montpellier, est dans la catégorie des « paroisses situées au bord de la mer » aux termes des ordonnances qui fixent à quatre lieues de la côte la profondeur du territoire soumis au guet et à la défense des côtes. En conséquence, les habitants de Lavérune ne sont pas assujettis au service de la milice de terre, mais à celui de la milice garde-côtes. En temps de guerre, le garde-côte a l’assurance de ne pas être versé dans quelque régiment du roi qui l’amènerait sur quelque champ de bataille éloigné. Cette garantie est diminuée par le fait que les paroisses du bord de mer peuvent être appelées à fournir des matelots auxiliaires lorsque le système des classes s’avère insuffisant. À défaut de se retrouver sur un champ de bataille, le Lavérunois peut donc contribuer à armer les vaisseaux du roi et, pour le moins, à renforcer le nombre de matelots employés à terre à Sète ou à Toulon. Le service dans les gardes-côtes n’est donc pas totalement anodin ; l’organisation du tirage au sort, dans la partie qui en incombe aux consuls et au conseil politique, n’est donc pas sans conséquences parfois désagréables. C’était vraisemblablement pour le corps municipal un moment délicat de son exercice annuel et dont il se tirait d’après des recettes traditionnelles. Mais sa façon d’agir n’a laissé de traces écrites ni à Lavérune, ni dans les villages voisins (2). Nous ne pouvons que présenter quelques notations recueillies dans les archives et qui concernent ce point précis de la gestion municipale.

Sans entrer dans le détail, quelques précisions sur le système des gardes-côtes ne sont pas inutiles.

Les côtes du Languedoc n’étaient pas moins exposées que celles de l’Atlantique ou de la Manche aux entreprises maritimes des ennemis du roi de France. Elles étaient donc à protéger et un système de garde des côtes existait déjà au XVIe siècle. Comme il est naturel, cette défense incombait d’abord aux populations les plus proches du rivage. En 1716, le Régent, remaniant l’organisation de Louis XIV, avait intégré au système général de la milice les charges de la défense côtière. Dans les paroisses proches de la mer, on tirait donc au sort pour la milice garde-côte et les habitants de ces paroisses furent dispensés du service dans la milice de terre dès 1757. L’avantage de ne pas devoir servir au-delà des limites de la capitainerie des gardes-côtes était tel que bien des jeunes gens s’engageaient comme valets chez des personnes résidant dans une paroisse côtière pour échapper aux aléas de la milice de terre. […]

Informations complémentaires

Année de publication

1989

Nombre de pages

4

Auteur(s)

Pierre CARLES

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf