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Description

L’Impôt sur le sel et ses conséquences sur l’activité économique
du Gévaudan au XVIIIème siècle

Nous nous proposons non pas d’étudier la gabelle en elle-même mais les litiges, les démêlés, les heurts auxquels elle a donné lieu. Il s’agit, en fait, des variations du prix du sel et de leurs répercussions sur l’industrie lainière, activité vitale pour le Gévaudan comme l’ont montré l’intendant Basville en 1697 (Il n’y a point de paysan qui n’ait au moins un métier chez lui) et, au cours du XVIIIème siècle, tous les auteurs de Mémoires sur le pays de Gévaudan. En 1810, le département de la Lozère employait 18,4 % de la main d’œuvre des industries lainières de l’ex-généralité de Montpellier et assurait 46,5 % de la production. Nous esquisserons à grands traits l’organisation de la gabelle en Gévaudan en insistant sur les difficultés d’acheminement du sel. Nous évoquerons l’interminable conflit sur le prix du sel qui opposa le Gévaudan à la Ferme Générale tout au cours du XVIIIème siècle. Enfin, nous nous interrogerons sur les rapports entre les fluctuations du prix du sel, l’état du troupeau ovin et les vicissitudes de l’industrie lainière.

I – LA GABELLE EN GÉVAUDAN

1) Cadres administratifs

Si l’on se réfère à Marcel Marion, la gabelle était, après la taille, la principale source de revenus de l’Ancien Régime. Son rapport dépassait, de beaucoup, celui de la Capitation, de peu celui des vingtièmes. Elle était affermée à des traitants ou fermiers généraux, qui concluaient avec le Contrôleur Général des Finances un bail fixant le produit annuel à attendre de cet impôt. En 1687, le Bail Domergue était conclu sur la base de 23 700 000 livres. En 1774, le bail Laurent Dard assignait à la gabelle un plafond de 47 millions de livres qui fut relevé, en 1789, à 58 millions 1/2 de livres par le bail Mager.

Avec le Lyonnais, le Beaujolais, la Bresse, le Mâconnais, les élections de Millau et de Rodez qui dépendaient de la généralité de Riom, la Provence, le Roussillon, le Forez et le Velay, le Languedoc faisait partie des pays de petite gabelle. Le sel y était moins cher que dans les pays de grande gabelle et la consommation par tête plus élevée. Cependant, le prix du sel avait fortement augmenté : après s’être maintenu entre 6 et 8 sous la livre au cours du XVIIIème siècle, il avait été porté à 11 livres 3/4 sous Necker. De plus, les pays de Petite Gabelle manquaient eux-mêmes d’unité. Le sel se vendait 40 à 42 livres le quintal (l’ancien quintal entre 40 et 50 kg) dans le Lyonnais, 24 à 27 livres en Provence, 20 livres à Montpellier au début du XVIIIème siècle, Ici, une mise au point métrologique s’impose. Quelques auteurs donnent le prix du sel au quintal ancien ; mais l’unité de mesure usuelle pour le sel était le minot, dont le poids et la capacité variaient selon les régions. Toujours selon Marion, le minot valait, en pays de petite gabelle, 4 boisseaux, soit 52 livres ; mais en pays de grande gabelle, le minot équivalait à 72 litres de sel réputés peser 100 livres anciennes (entre 40 et 50 kg) on pouvait donc, en pays de grande gabelle, assimiler le minot au quintal ancien. Par contre, à Paris, le minot ne représentait plus que 39 livres de sel. Inutile d’insister sur le fait qu’une telle disparité des poids et mesures encourageait la fraude… En Languedoc même, du fait de sa situation géographique (relief accidenté, éloignement de la mer) et de son organisation particulière (paréage, États), le Gévaudan occupait une place à part. C’est ainsi que la gabelle ne s’y mit en place que tardivement et sur plus d’un siècle. Le 14 mars 1588, un Édit d’Henri III créa par tout le royaume des offices de regratiers et revendeurs de sel. Ces offices apparurent dans le Gévaudan dès les premières années du XVIIème siècle. A Chateauneuf-de-Randon, en 1604, Jean Cayroche acheta un office de regratier ; un autre fut créé en 1609, trois en 1626, trois autres en 1636. Ces offices, en eux-mêmes fort lucratifs, flattaient agréablement la vanité des parvenus qui les acquéraient, d’où leur cherté croissante la charge de regratier se vendait 70 livres en 1604, 100 livres en 1626 et 350 livres en 1636 (à raison de 15 livres au comptant et le solde en 2 versements égaux). […]

Informations complémentaires

Année de publication

1983

Nombre de pages

6

Auteur(s)

R. J. BERNARD

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf