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Description

Les Élections Législatives du 24 avril 1910
dans la circonscription de Pézenas-Bédarieux :
Changements politiques et continuité notabiliaire

Les élections législatives du 24 Avril 1910 sont généralement considérées comme de peu d’importance sur le plan national alors que les élections de 1906 sont qualifiées « d’élections de lutte comme les précédentes », J.J. Chevallier estime que celles de 1910 sont « des élections d’apaisement ». Tout au plus marqueraient-elles la dislocation du Bloc républicain et la formation d’une majorité de centre droit. Même pour l’histoire de l’électorat et du mouvement socialiste, ces élections seraient quantité négligeable : G. Lefranc, s’il évoque les scrutins de 1906 et 1914 mentionne à peine ceux des 24 avril et 8 mai 1910. Ils sont pourtant à la crête de cette période parlementaire 1906-1914 où dans le parti socialiste, « une nouvelle extrême-gauche surgit et une nouvelle droite se cherche ».

Toujours est-il que ces élections sont très importantes dans le département de l’Hérault elles sonnent le glas de l’hégémonie radicale et radical-socialiste ; elles sont à l’origine de la levée d’une nouvelle génération de notables. La défaite des radicaux y est peut-être « plus spectaculaire que réelle dans la mesure où (ils) conservent à peu près fidèlement leur électorat » et où cette stagnation se conjugue avec une forte poussée socialiste. Mais si l’on place ces élections dans les perspectives des cantonales du 31 Juillet 1910, et des législatives du 10 mai 1914, force est bien de constater que les changements de 1910 sont durables et ouvrent une nouvelle période dans la politique locale.

La deuxième circonscription de l’Hérault présente les traits les plus accusés de ces changements. Deux candidats s’y affrontent : le radical et radical-socialiste Justin Augé, 60 ans, conseiller général depuis 1889 et député de la circonscription depuis 1897. Un jeune socialiste unifié (SFIO) de 28 ans, Édouard Barthe, pharmacien à Sète et pratiquement inconnu jusque là. La nette victoire de ce dernier (1398 vois d’avance 53,47 % des suffrages exprimés) « plonge dans la stupeur les milieux préfectoraux » et consterne les radicaux qui, durant toute la campagne, avaient considéré la candidature Barthe comme fantaisiste.

La circonscription est la seconde du département en population, la plus étendue en superficie, la plus hétérogène aussi puisqu’elle réunit les hauts cantons de St Gervais aux cantons de plaine. L’analyse du déroulement de la campagne permet de comprendre combien elle est une synthèse des changements à l’œuvre : le mode de la domination radicale est bâti sur le prestige parlementaire (Augé vit à Paris), sur la défense corporative des produits de la vigne languedocienne, sur la fonction d’intégration du rassemblement partisan, oscillant entre la formule « toujours à gauche mais pas plus loin » et la recherche d’ouvertures à l’électorat « conservateur raisonnable c’est-à-dire non monarchiste ».

Ce mode de domination, consécutif à l’installation de la IIIe République est en décalage avec les mutations sociopolitiques qui travaillent l’électorat « républicain », celui de la population vigneronne, petits et moyens producteurs indépendants.

Il est traditionnel de présenter ces mutations comme un glissement à gauche ou une radicalisation politique. En réalité elles interviennent dans un contexte de grande confusion politique et de faiblesse insigne du mouvement socialiste. Tant et si bien que si le nom des notables change définitivement avec l’élection de 1910, une constante demeure au-dessus des grandes options programmatiques : c’est la défense corporative de la viticulture. Édouard Barthe est l’expression de ces changements paradoxaux […]

Informations complémentaires

Année de publication

1980

Nombre de pages

13

Auteur(s)

Paul ALLIES

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf