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Description

Le spirituel dans le Cartulaire de l’abbaye Sainte Marie de Valmagne, ordre de Cîteaux, diocèse d’Agde

I. – Il peut sembler superflu ou inconvenant de rechercher les traces du spirituel dans un manuscrit provenant d’un monastère. En effet l’objet fondamental de la vie monastique est de parvenir au Royaume des Cieux. S. Benoit propose sa Règle Domino Christo vero regi militaturus à celui qui se dispose à combattre pour le Seigneur Christ. Le moine persévérant dans la doctrine du Christ jusqu’à la mort dans le monastère participera à la Passion du Christ par la patience et méritera d’avoir part à son royaume, in ejus doctrina usque ad mortem in monasterio perseverantes, passionibus Christi per patientiam participemur, ut et regno ejus mereamur esse consortes.

Les documents primitifs de Cîteaux, le Nouveau monastère, affirment le souci des moines revenant de Molesmes, de s’en tenir à la stricte observation de la Règle, refuser tout ce qu’elle ne prévoit pas. Méprisant les richesses du monde, les nouveaux soldats du Christ, les cisterciens, pauvres avec le Christ pauvre ecce hujus saeculi divitiis spretis, coeperunt novi milites Christi cum paupere Christo pauperes, se considèrent comme une milice spirituelle que la miséricorde de Dieu developpera et mènera à sa perfection au profit d’un grand nombre, sed Dei misericordia, qui hanc militiam spiritualem suis inspiravit ad multorum profectum egregie eam amplificare et consummare non cessavit.

II. – Au cours de l’année 1982 nous avons commencé le dépouillement du Cartulaire de l’abbaye cistercienne sainte Marie de Valmagne, ordre de Cîteaux, diocèse d’Agde, en vue de son édition scientifique. La transcription, analyse, indexation des textes ont été achevés en avril 2002. Nous espérons, après des difficultés techniques, achever cette édition et voir enfin sa publication paraître dans un délai raisonnable. La cession du manuscrit aux Archives du Département de l’Hérault en 2005, a ranimé l’intérêt que les chercheurs lui portaient. Le présent article a pour but de saluer le don de Mme d’Allaines, propriétaire de l’ancienne abbaye et du cartulaire, et attirer l’attention des spécialistes sur l’intérêt de sa publication, et le renouvellement des connaissances historiques attendu pour toute notre région.

Ce travail nous a révélé, dans le cartulaire de Valmagne, une masse colossale de documents inédits et inemployés dans leur quasi-totalité. Le total des actes approche le millier, leur rédaction s’étend de 1139 à 1215 avec une exception 1235. Le collationnement des chartes originales dans le cartulaire a été précoce, commencé en 1185, donc presque contemporain des actes souscrits.

III. – Le cartulaire est un document de gestion, il est destiné à établir les droits du monastère sur les biens donnés, vendus ou échangés. Des tables et répertoires, un système de numérotation et de classement permettent les recherches. On y constate une extrême minutie dans le souci des moines de prouver leurs droits. Les actes de cessions, ventes, échanges sont accompagnés le plus souvent d’actes antérieurs, d’enquêtes, de témoignages, de confirmations, renonciations à poursuites etc. Le sens de la justice et de l’équité est présent, mais on décèle également une âpreté certaine dans l’affirmation des droits du monastère, dans leur défense, les discussions, les procédures judiciaires et conflits éventuels.

Si bien que, à la lecture, relecture, étude et comparaison de ces textes, le chercheur éprouve l’impression assez désolante que la gestion attentive, presque affairiste, et sans concession du temporel est prépondérante. Où sont donc ces moines pauvres avec le Christ pauvre… ?

Si bien que, prononçant une communication sur ce manuscrit, nous avons posé au sujet du monastère de Valmagne la question saugrenue : Le Royaume de Dieu est-il donné par surcroît ?

C’est à cette question que tente de répondre la présente étude. Valmagne fut-elle une Maison de prières, ou seulement un centre de gestion ?

Le cartulaire lui-même et lui seul peut répondre, étant la source documentaire unique sur le monastère pour la période la plus féconde de sa vie. Pourvu que l’attention du chercheur ne s’arrêtât pas au seul aspect juridico-gestionnaire du temporel, mais sût trouver, nonobstant la destination des documents, les traces du spirituel.

Hors du cartulaire proprement dit, le spirituel à Valmagne au XIIe et au XIIIe siècles n’a pas laissé d’échos. Le rôle ecclésiastique de l’abbaye est assuré au moment de la prédication anti-hérétique en Narbonnaise, puisque l’abbé Pierre III fut l’un des associés – et une caution cistercienne – du légat Pierre de Castelnau. L’évêque de Béziers, en 1201, salue la régularité des cisterciens en général et des moines de Valmagne en particulier. […]

Informations complémentaires

Année de publication

2006

Nombre de pages

23

Auteur(s)

Henri BARTHÉS

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf