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Description

Le goût des collectionneurs montpelliérains au XVIIe siècle

Dans son ouvrage, Le géant, la licorne et la tulipe (1988), Antoine Schnapper a brillamment évoqué les collections françaises du XVIIème siècle. Beaucoup de collectionneurs montpelliérains ayant occupé une place importante dans ce domaine, mon propos, en parallèle à ce travail de synthèse considérable, est de brosser pour Montpellier un tableau exhaustif des cabinets connus. A travers les antiquités, les médailles, les curiosités, l’histoire naturelle et l’art, il sera ainsi plus aisé de prendre conscience des goûts particuliers à la ville.

Le voyage de François Ier dans le Midi en 1533, à l’occasion duquel les Nîmois le virent « un genou à terre, nettoyer lui-même avec son mouchoir la poussière qui couvrait les lettres des inscriptions romaines, afin de les lire avec plus de facilité », incita les milieux cultivés de l’ancienne Narbonnaise à s’intéresser aux antiquités. Mais Montpellier, la plus récente des métropoles du Bas-Languedoc, en dehors des structures de la Via Domitia, était pénalisée par rapport à ses voisines.

Cependant le médecin François de Ranchin (1564-1641) « curieux de livres et de pièces qui regardent l’antiquité », pouvait se flatter grâce à des moyens financiers appréciables de posséder un cabinet important que Nicolas Fabri de Peiresc chercha à lui acheter. Il avait en effet, sept à huit cent pierre gravées, la plupart antiques, quantité de pièces de funéraille et de sacrifice ainsi que quelques bonnes pièces de relief de marbre et de bronze, parmi lesquelles la « chaire de préteur » provenant des arènes de Nîmes et trois bas-reliefs en marbre qu’il donna à la Faculté de Médecine de Montpellier, dont il fut chancelier et où ils se trouvent encore. Ses héritiers conservèrent le cabinet et semblent même l’avoir complété avant de le vendre en bloc au début du XVIIIe siècle, au désespoir du jeune président de la Cour des Comptes Aides et Finances de Montpellier, François-Xavier Bon (1678-1761) qui ne put en faire l’acquisition alors qu’il commençait à monter sa propre collection.

Le cabinet Bornier ou Teillan, vendu en 1711, est l’oeuvre de trois générations de conseillers à la Cour des Comptes dont il est difficile de départager l’apport particulier : Simon de Bornier (1604-1648), son fils Pierre (1631-1668) et enfin son petit-fils Jacques Philippe (1662-1711). Mentionnée par Pierre Borel dès 1649, cette collection est décrite par un état datant de 1711 (cf. Annexe). Les seules antiquités qu’elle renferme « seize figures de bronze sur des pieds d’estau de bois représentant plusieurs animaux et figures des dieux des païens », sont des idoles égyptiennes que François-Xavier Bon réussit cette fois à s’approprier. D’autre part, les Bornier, dans le parc de leur château de Teillan situé prés de Marsillargues à mi-chemin entre Nîmes et Montpellier, avaient rassemblé après 1665 six bornes milliaires. En effet, à cette date, les deux bornes les plus importantes de César Auguste étaient encore signalées à leur emplacement d’origine par le chanoine Pierre Gariel (1584-1674). Il était alors de pratique courante d’enlever du site de la Via Domitia les vestiges antiques les plus représentatifs qui la balisaient. Ces éléments intégrés dans les demeures seigneuriales devenaient alors de véritables apanages nobiliaires. Mais, la concentration de Teillan dépasse cette pratique puisque sont associés aux bornes militaires deux autels votifs, six stèles funéraires et enfin trois bas-reliefs plus tardifs. C’est le même phénomène que l’on observe chez P. Gariel à Montpellier. « Homme savant et fort curieux de l’antiquité », il avait réuni, dans le jardin de sa maison, quelques inscriptions antiques de la voie Domitienne comme celle provenant du site de Substantio : « Sur l’avis qui me fut donné que tout proche de l’église de Substention, en une muraille sèche et de cailloux, paraissait une pierre vive écrite à la romaine, je fus sur le lieu pour la voir, la fis tirer et emporter à Montpellier, et la fis bâtir contre une muraille d’un mien petit jardin… ». Les autres collections d’antiquités sont de moindre importance. P. Gariel parle de Jacques-Philippe de Maussac, président de la Cour des Comptes en 1631, qui possédait un curieux et docte cabinet dont un des trésors était une belle pierre d’albâtre. Enfin, des antiquités et autres statues sont mentionnées incidemment dans les cabinets Veissière, Joubert et Catelan dont il sera question par la suite. […]

Informations complémentaires

Année de publication

1993

Nombre de pages

6

Auteur(s)

Alain CHEVALIER

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf