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Description

Le Bas-Languedoc (Fin 18e siècle-début 19e) Images et réalité

Après réflexion on s’est limité au Bas-Languedoc (Aude, Hérault, Gard) car il est difficile d’intégrer toute la province dans des frontières départementales « modernes ». Nous avons déjà affronté ce problème en 1972, mais il n’est pas propre à cette région : « Les statistiques sont presque toujours basées sur des divisions administratives qui ne correspondent à aucune réalité en géographie économique… ». Ces trois départements présentent une unité de civilisation agraire qui n’a pas échappé aux géographes : Perpillou évoque avec bonheur, en 1954, l’ « ancien paysage agricole languedocien », ses vignes et ses cultures, mais cependant jamais de vraie « cultura promiscua », comme dans la plaine du Pô, à savoir : ceps, arbres fruitiers et céréales sur le même sol, peut-être par suite d’une moindre densité de population (Le témoignage d’A. Young qu’invoque A. Soboul, à propos d’une telle pratique dans le Montpelliérain, ne semble pas devoir emporter l’adhésion).

Une étude d’économie rétrospective, à l’aube de la période dite contemporaine, doit tout d’abord « tordre son cou », à des préjugés anti-statistiques fort enracinés, y compris chez les historiens. Or des possibilités de vérification existent ainsi, dans notre thèse, nous avons pu calculer, par l’étude comparée de fonds identiques – des séries consulaires mais relevant de deux États – le pourcentage de fraude entre Venise et Trieste : 8%, bien faible pour l’époque. Les statistiques des récoltes, entre autres, ont été longtemps contestées en France. N’a-t-on pas été jusqu’à accuser M. Thiers d’avoir falsifié celle de 1872, afin d’assurer le succès de « son » emprunt ? Une heureuse découverte d’archives privées marseillaises, celles du négociant Barthélémy, nous a cependant permis de constater leur validité, pour douze années. Et si Augé-Laribé s’est montré sévère pour les grandes enquêtes agricoles françaises de 1882-1892, par contre F. Bernard, professeur d’économie rurale à Montpellier, leur a accordé un grand crédit et n’a pas manqué de citer tel journal anglais qui mettait la France au premier rang européen pour ses statistiques agricoles (Sur les distinctions que F. Bernard a faites entre les quatre grands blocs d’enquêtes : celles de l’an II, de l’an VII, de 1840… « assez bien menée »… – à cause du cadastre – et de 1852, à propos de laquelle il émettait des réserves, l’on ne peut que renvoyer le lecteur à son article). Même fiables toutes les statistiques ne se valent pas… Au moment où nous achevions notre communication, paraissait l’étude de F. Roubaud, approche statistiquement très élaborée de l’enquête de 1840 qui mériterait à elle seule un long commentaire, mais ne va pas, bien au contraire, dans un sens défavorable à nos hypothèses de travail. Qu’en conclure, sinon avec l’éminent statisticien L. Bodio, qu’à la limite le seul qui puisse tirer profit de telle statistique de produits coloniaux est celui qui connait ce commerce de l’intérieur ? La remarque, du reste, ne vaut pas que pour les statistiques commerciales elle s’applique à tous les secteurs d’activité « chiffrés ».

Ces réflexions préalables ne se voulaient qu’une approche de l’image « ensoleillée » du Languedoc à l’époque moderne, image attestée, entre autres, par l’Encyclopédie et divers auteurs cités par L. Dutil. La liste n’est pas exhaustive… Les géographes, eux, avaient rétabli l’équilibre, tel Daniel Faucher évoquant, en 1934. les dures contraintes climatiques du Midi, qui pèsent sur les blés de printemps, la production du fourrage, et, de plus, sont inséparables de la médiocrité des sols : « Derrière ses aspects de grande insouciance, il faut voir aussi ce qu’elle (l’ancienne économie agraire) avait d’oppressif ». Mais il ne s’ensuit pas pour autant que l’image soit radicalement fausse !… ce que confirme une première approche, celle des statistiques de l’époque révolutionnaire.

En 1789 le pouvoir royal ne dispose pas de séries fiables : tous les auteurs qui ont traité de l’agriculture se copient plus ou moins sur un fond de pauvreté « sérielle » : de Pradt, Boiteau, Lazowski, Dupont de Nemours, et même Lavoisier, lequel « ne dit pas toujours sur quelle base reposent ses calculs… ». Le mieux, là encore, est de citer Festy qui a travaillé dans les archives de l’Académie d’agriculture : « Or la Révolution, à ses débuts, ne possédait aucune documentation statistique […]

Informations complémentaires

Année de publication

1985

Nombre de pages

8

Auteur(s)

Jean GEORGELIN

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf