Jean-Michel FAIDIT : Ces Héraultais dans la Lune…

Les cratères de la Lune portent des noms de personnalités célèbres.
Sur quelque 1 500 cratères ainsi désignés, 166 sont dédiés à des Français, dont trois à des Héraultais.

Si la Lune a inspiré les œuvres de Cyrano de Bergerac, Fontenelle et bien sûr Jules Verne, force est de reconnaître qu’elle n’intéresse plus grand monde. Considérée comme un astre mort, rares sont les observateurs à daigner y prêter attention, le plus souvent à la faveur d’une éclipse (comme celle de la « Super Lune » au périgée de ce 28 septembre 2015). Ce qui attire alors, c’est la coloration plus ou moins ocre-rouge de sa surface en fonction de la facilité – selon la densité des nuages – pour les rayons du Soleil déviés de traverser l’atmosphère de la Terre, explication apportée dès 1709 par le mathématicien montpelliérain Jean de Clapiès. De l’autre côté du Rhône, bénéficiant aussi d’un climat propice aux observations, l’aixois Peiresc, découvreur de la nébuleuse d’Orion en 1610 (après avoir soutenu à Montpellier son Doctorat auprès du jurisconsulte Jules Pacius), entreprit de réaliser, avec Gassendi et le peintre Claude Mellan, la première carte de la Lune en 1636.

Et pourtant, il y a seulement un siècle, au temps de Flammarion, c’était l’astre le plus populaire. Les amateurs d’astronomie, qui se désignaient « Observateurs », y consacraient une part importante de leurs soirées célestes. La Sélénographie était à la mode. On connaissait les noms de la plupart des cratères. On cherchait souvent à les observer. Et on aimait à les dessiner, comme les mers et les océans, l’œil exercé pouvant dans ce domaine saisir des détails qui échappaient encore à la photographie.

La télévision n’existait pas encore pour meubler les soirées. Ah !, la télévision ! Qu’elles semblent loin ces années des missions Apollo et des premiers pas des astronautes sur la Lune, en l’occurrence ceux de Neil Armstrong (qui vient de nous quitter) et d’Edwin Aldrin, en présence de millions de téléspectateurs qui se pressaient devant les terrasses de cafés en cette nuit du 20 au 21 juillet 1969 pour entendre ces mots désormais gravés dans la légende : « Un petit pas pour l’homme, un bond de géant pour l’humanité ».

Je me souviens avec émotion de cette fameuse nuit qui a marqué mon enfance. Nous étions à Lamalou-les-Bains et, cet été là, on regardait la Lune différemment. Quelques années plus tard, le 13 septembre 1978, j’observai à l’œil nu à Saint-Chaptes ma première éclipse de Lune…

A la Belle Époque, au seuil des années 1900, c’était un honneur d’avoir un cratère de la Lune qui porte son nom. Tandis que les astronomes amateurs préfèrent de nos jours se voir dédier un astéroïde nouvellement découvert… Avouons qu’il n’y a pourtant pas photo ! Quel intérêt peut représenter un bout de caillou, perdu parmi des millions d’autres gravitant entre Mars et Jupiter, alors que la Lune est majestueusement accessible aux yeux de milliards de terriens ?

Il est un fait que cet insigne honneur n’est pas donné à beaucoup. Parmi les 166 Français qui ont droit à ce Panthéon lunaire, trois sont natifs du département de l’Hérault : le Biterrois Jean-Jacques Dortous de Mairan (né à Maureilhan), le Montpelliérain Édouard Roche et le Sétois Jean-Félix Gambart, futur directeur de l’Observatoire de Marseille. La publication récente d’un recueil de biographies présentant ces personnalités et leurs cratères est l’occasion de les évoquer.

Jean-Félix Adolphe Gambart (1800-1836),
astronome

Gambart est associé à l’Observatoire de Marseille qu’il redynamise en découvrant treize comètes. Engagé dans la Marine en 1814, ses aptitudes scientifiques sont remarquées par Bouvard qui le fait venir à Paris. En 1819, le Bureau des Longitudes l’affecte à l’Observatoire de Marseille, fondé en 1702, mais délaissé depuis longtemps et dont il devient directeur à l’âge de 21 ans. Rénovation des bâtiments, acquisition d’instruments avec le soutien de Laplace, observations et correspondances, il est un astronome bâtisseur. Avec 13 comètes, il prolonge le record mondial de Pons, qui en a découvert 39. Il établit l’orbite de la comète Bièla, troisième périodique identifiée, qui aurait dû porter son nom à l’instar des comètes de Halley et de Encke. Arago déplore cette injustice dans sa notice biographique. Gambart est vaincu par la tuberculose à 36 ans. Correspondant de l’Académie des Sciences dès 1831, outre ce cratère, la Ville de Sète lui a dédié en 1892 l’une de ses rues. (fig. 1)

Cratère Lunaire Gambart
Fig. 1 - Cratère Gambart : Coordonnées lunaires : 0°92 Nord - 15.24° Ouest (Mare Insularum). Diamètre : 24,68 km - Profondeur : 1,1 km - Année de dénomination : 1935

Jean-Jacques Dortous de Mairan(1678-1771),
mathématicien, physicien, astronome, météorologiste, géophysicien,
Secrétaire-perpétuel de l’Académie des Sciences

Mairan est surtout connu par son Traité de l’aurore boréale (1733, 1754) qui en fait le fondateur de la physique des relations Soleil-Terre. Il fait ses études au Collège de Toulouse, puis à Paris de 1698 à 1704 auprès de Malebranche. En 1718, il devient secrétaire du Régent et s’installe au Louvre, jouant un rôle de premier plan à l’Académie des Sciences avec Réaumur et Fontenelle à qui il succède. Son style charmant et élégant lui ouvre la République des Lettres où les savants se désignent philosophes. Il fonde l’Académie de Béziers en 1723, et rédige le Journal des savants à partir de 1752. Il découvre l’objet de Messier M43 en 1731, près de la nébuleuse d’Orion. Lauréat de trois Prix de l’Académie de Bordeaux en 1715, 1716, et 1717, il est admis à l’Académie des Sciences en 1718, géomètre sans être adjoint. Il en est Secrétaire-Perpétuel de 1740 à 1743. Il est élu à l’Académie française en 1743. Une école et une rue de Béziers portent son nom. (fig. 2 et 2 bis)

Jean-Jacques de Mairan
Fig. 2 - Jean-Jacques de Mairan
Cratère Lunaire Mairan
Fig. 2Bis - Cratère Lunaire Mairan : Coordonnées lunaires : 41.63° Nord - 43.5° Ouest (Oceanum Procellarum / Mare Imbrium). Diamètre : 39,49 km - Profondeur : 2,67 km - Année de dénomination : 1935

Édouard Albert Roche (1820-1883),
mathématicien, astronome, météorologiste

Roche est connu pour la découverte des « limites de Roche ». Il fait ses études à Montpellier et séjourne de 1844 à 1847 à l’Observatoire de Paris auprès d’Arago, à l’époque de la découverte de Neptune. Il enseigne à la Faculté des Sciences de Montpellier. En cherchant à expliquer l’origine de l’anneau de Saturne, il pointe du doigt en 1849 une notion clé : la limite de Roche, distance minimale pour la stabilité d’un satellite soumis à des forces de marées. Le problème étendu à l’interaction des atmosphères aboutit aux lobes de Roche des étoiles doubles dans les années 1950. Son isolement provincial favorise l’émergence d’idées nouvelles, mais freine leur diffusion. Les nombreuses applications de ses limites en astrophysique et astronomie planétaire lui vaudraient de nos jours un Prix Nobel. Correspondant depuis 1873, l’Académie des Sciences ne lui accorde qu’une voix sur 56 votants en 1883, refusant son admission ! C’était deux jours avant sa mort, mais c’est une maladie des poumons qui en fut la cause… (fig. 3 et 3 bis) Jean-Michel Faidit (contact@faidit.fr)

Édouard Albert Roche
Fig. 3 - Édouard Albert Roche
Cratère Lunaire Roche
Fig. 3Bis - Cratère Lunaire Roche : Coordonnées lunaires : -42.37° Sud -136.54° Est (Face cachée). Diamètre : 152,67 km - Profondeur : inconnue - Année de dénomination : 1970

Bibliographie

Faidit, Jean-Michel, Ces Français dans la Lune… Cratères et Biographies, Les Presses du Midi, Toulon, 2013.

Jean-Claude RICHARD RALITE : Joseph Chauvet (1794-1875) candidat au Musée Fabre

Nous avons déjà évoqué J. Chauvet (Études Héraultaises, n° 43, 2013, p. 231) dont la carrière fut surprenante. Grâce à P.-J. Bernard, nous venons d’avoir connaissance d’une correspondance (conservée aux Archives Municipales de Montpellier, 2R NC 1042, Musée Fabre, Dons et legs) dans laquelle nous trouvons son cursus complet qui nous manquait :

« Monsieur le Maire, Le soussigné Joseph-Marie Chauvet, natif du département de l’Hérault, a l’honneur de vous soumettre l’exposé suivant, aux fins d’obtenir l’emploi de conservateur du Musée Fabre de la ville de Montpellier, demeuré vacant pas le décès de Mr Matet [19 juillet 1870].

Dès 1811, époque à laquelle l’exposant termina ses classes au Lycée de Montpellier, il s’est livré résolument à l’étude des Arts, de l’Archéologie et au goût des collections.

Il avait déjà eu, en 1810, le 1er prix des académies, avec médaille d’argent, à l’école de dessin de cette ville et il obtint, en 1811, le 1er prix de ronde bosse à la même école.

Très peu de temps après, il fut à Toulouse prendre les grades à la faculté de Droit, et suivre simultanément, à l’École des Arts de cette ville, les cours de modèle vivant, de peinture, de sculpture et d’architecture.

Tout cela le mit à même de faire des recherches utiles dans les départements de l’Hérault et de la Haute Garonne.

Installé à Vendémian et préférant, aux occupations sédentaires du barreau, les travaux plus actifs de l’ingénieur et de l’architecte, il eut encore mille occasions de faire des fouilles et des découvertes. Employé dans le Cadastre comme géomètre de 1ère classe, il vit s’ouvrir un champ plus vaste à ses explorations, qu’il put étendre à la partie Sud du Rouergue, tout en faisant des triangulations dans le canton de St Gervais, limitrophe du département de l’Aveyron.

En 1839, appelé dans le département de l’Allier pour y organiser et diriger le Service vicinal en qualité d’agent-voyer en chef, il eut encore, dans ses tournées, des occasions favorables pour parcourir et fouiller une bonne partie du Bourbonnais.

Enfin en 1849, au bout de dix ans d’exercice et alors que le Gouvernement de 1848 l’avait respecté, il donna sa démission d’agent-voyer en faveur d’un successeur de son choix, pour se reposer et ne s’occuper dans ses vieux jours que de ses collections.

Il s’établit d’abord, pendant dix-huit mois, à Clermont-Ferrand pour visiter l’Auvergne qu’il désirait depuis longtemps connaître. Après quoi il vint à Vichy-les-Bains pour y fonder un Musée. Il acheta d’abord un terrain et commença d’y faire construire mais les approches du Chemin de fer et plus encore le mauvais choix qu’il avait fait d’un emplacement trop éloigné des Établissements thermaux, le forcèrent, en 1857, à abandonner provisoirement ce premier essai.

Tel est, Monsieur le Maire, l’exposé des antécédents que le soussigné a cru utile de mettre sous vos yeux, pour vous édifier sur la présente demande, ajoutant qu’il offre de faire abandon à la Ville de Montpellier de toutes ses collections.

Désireux de retourner dans son pays et d’acquérir la certitude qu’après sa mort les collections diverses qui lui ont coûté tant de labeurs, ne seront pas perdues ou dispersées, il a pensé qu’elles trouveraient un refuge assuré dans le Musée de la Ville.

Si sa fortune le lui permettait, il serait heureux d’imiter le noble exemple qui lui a été donné par d’autres généreux citoyens, mais obligé de vivre de son travail il ne peut faire ce don absolu.

Pour assurer la propriété de ses collections à la Ville, l’exposant serait tout disposé à les lui abandonner, moyennant une modeste pension viagère, bien inférieure à leur valeur et qui se confondrait avec les émoluments de Conservateur du Musée. Cette combinaison, ce lui semble, aurait l’avantage de ménager les finances de la Ville.

Afin que Monsieur le Maire puisse avoir une idée des collections de l’exposant, un aperçu sommaire de ces collections est joint à la présente, ainsi que deux rapports qui ont été faits et publiés en 1856, sur leur importance par Mr Jomard et Mr de Fréville. [Un résumé de ces rapports élogieux se trouve dans le Journal de Vichy du 5 juillet et du 24 juillet 1856]

Il a l’honneur d’être, Monsieur le Maire, votre très humble et très obéissant serviteur. J. CHAUVET. »

Ce plaidoyer est suivi, en quatre pages, d’un Aperçu des collections de Mr. Chauvet, sous les rubriques : Archéologie, Numismatique, Géologie, Bibliothèque, Peinture, Divers. Cet inventaire thématique ne donne pas les provenances que nous connaissons, pour la plus grande partie, par le Catalogue manuscrit que nous avons déjà signalé et dont une publication est en cours.

Le Maire de Montpellier (entre avril 1870 et septembre 1871 la Ville eut cinq maires successifs !) dont nous ne possédons pas la réponse mais qui a été certainement négative, avait bien d’autres soucis d’autant plus que le Musée Fabre était considérée comme un Musée de peinture, avec les célèbres collections Fabre et Bruyas. Le musée de la Société archéologique aurait mieux correspondu à un tel ensemble, mais il est surprenant que J. Chauvet, qui avait été un des premiers membres de cette Compagnie, ne lui ait pas fait cette proposition (nous ne pouvons pas l’affirmer car nous n’en avons pas trace, à ce jour) à moins que les conditions posées n’aient pas davantage convenu à la Société.

J. Chauvet, qui avait dépassé les soixante-dix ans, disparait en 1875 et sa collection sera acquise (en totalité, en partie ?) par un collectionneur qui la céda à l’Académie de Clermont-Ferrand où elle a été directement intégrée aux collections présentes. Malheureusement, les lieux de découverte – qui figurent très précisément sur le Catalogue manuscrit – n’ont pas été maintenus et les classements actuels ont été faits par catégories de documents.

Quelques documents signalés dans le Catalogue peuvent cependant être encore localisés et étudiés, en particulier quelques inscriptions ou céramiques, mais l’essentiel, provenant de sites de l’Hérault, entre Montpellier et Vendémian, ou de La Graufesenque (Millau, Aveyron) resteront scientifiquement inédits. [Jean-Claude Richard Ralite]

Louis SECONDY : Au revoir à la Semaine religieuse

Le 21 septembre 2000 paraissait sous un nouveau format et une présentation totalement rénovée La Semaine religieuse du diocèse de Montpellier qui changeait de nom pour s’appeler Église de Montpellier. La couleur allait rendre plus attirante cette vieille revue du diocèse qui avait déjà 132 ans. Ce bulletin diocésain fut encore modernisé jusque dans son titre qui devint Église en Pays d’Hérault. A l’heure où la formule papier va disparaître après avoir vécu 147 ans, on peut essayer de mesurer ses principaux apports. Un bilan, si limité soit-il s’impose, au moment du passage à internet.

Cette revue naît le 8 août 1858. Sur les 92 évêchés de France et des colonies, 51 ont déjà une revue de ce type. De cette date à 2015, elle comportera plus de 7 000 numéros. Elle a permis à de nombreux catholiques du diocèse, au clergé d’abord, mais aussi à de nombreux laïcs – elle atteindra 4 000 abonnés à certains moments de son histoire – de suivre les événements du monde sous un angle particulier : celui de l’Église, ainsi que les grandes phases de son histoire au fur et à mesure de leur déroulement, à la fois sous l’angle universel et sous l’angle diocésain. Ce bulletin se voulait, dès ses débuts, mémoire. Il fut et est resté à la fois une source d’information, longtemps hebdomadaire, à l’échelon du diocèse, mais aussi des paroisses, tout en étant un outil de réflexion, de formation et de piété. Les directeurs y publient les textes pontificaux, les éditoriaux des évêques, des articles de réflexion, des pages destinées à approfondir les connaissances et la foi des lecteurs. Des théologiens et des pasteurs commentent ces textes ; les évêques en tirent des directives pour l’action pastorale. Il y a dans cette présentation plus que des nuances parfois. Songeons à la manière dont furent jugées les propositions de paix de Benoît XV en 1917 ou la condamnation de l’Action française. Au total, l’ensemble de ces numéros forme un grand livre de mémoire révélateur des évolutions de l’Église et du monde, des bouleversements dus aux guerres, des apports des conciles.

Mémoire des paroisses dont des chroniqueurs relatent les grands événements : missions, adorations, premières communions, érections de croix ou de statues, poses de premières pierres, bénédictions de cloches, cérémonies vouées à un saint particulier (Roch, Fulcran, Agapie)…

Mémoire des souffrances de l’Église : expulsions des religieux, fermetures d’écoles, débaptisations de rues et voies publiques, enlèvement des croix dans les écoles (Grabels, Saussan), séparation de l’Église et de l’État, confiscations, profanations, récits animés des inventaires dans de très nombreuses paroisses.

Mémoire des personnes et de leurs faits et gestes : nominations et décès des évêques, des prêtres et de laïcs de poids, tels que les professeurs Combal, Joseph Grasset, l’historienne Louise Guiraud, Jeanne Fontenay ; ordinations, consécrations, remises de décorations. C’est aussi une source précieuse sur la carrière des membres du clergé, aucune nomination n’étant valable si elle n’est pas publiée officiellement dans la revue diocésaine.

Bref ! Une ressource considérable pour les historiens de tous bords. Que de choses nous ignorerions sans cette source ! Mais pas seulement mémoire des faits et des hommes, mais aussi des mentalités, des manières de penser, de vivre, de pratiquer, des idéaux et des engagements proposés aux catholiques d’un temps.

La lecture des numéros de la revue entre 1858 et 2015 permet de découvrir progressivement, à travers ses articles, le visage d’une Église peuple de Dieu qui succède à une Église pyramidale. Finis les anathèmes et les condamnations des Juifs, des protestants, des franc-maçons, longtemps qualifiés par cette revue de membres de sectes ennemies de Dieu, pour laisser place à une attitude plus fraternelle et œcuménique. C’est la fin de l’opposition et de la ségrégation entre écoles catholiques et les « écoles sans Dieu », condamnées jadis sans appel, la naissance d’une vision radicalement nouvelle de la laïcité, du texte des évêques de 1925 à celui de 1945, l’évolution de la notion de mission et du sens de la vocation, de la place des laïcs et de leur collaboration avec les prêtres. Ainsi le lecteur qui a été fidèle à cette lecture sur des décennies a eu l’occasion de modifier sa conception du catholicisme.

On pourrait s’étonner que ce bulletin si sérieux recoure à la publicité. Il contient en effet des réclames abondantes, pour toutes sortes d’objets et de produits, des remèdes avant tout, des lotions pour la peau, des savons, des parfums, des produits alimentaires, du chocolat, des liqueurs, des vêtements, des meubles, des papiers peints… qui ont permis d’alléger la charge financière de la publication.

La Semaine religieuse a donc su se transformer et se plier aux exigences du temps. Nous sommes assurés que la formule sur internet saura garder cet esprit d’adaptation à notre monde, d’ouverture et de réflexion sur ces évolutions, et demeurera une source historique de premier plan. Aux gestionnaires du futur d’en faire la preuve.

Comme source de l’histoire religieuse contemporaine du département, la collection de la revue reste disponible pour consultation à la Maison diocésaine, 31 ter avenue St Lazare, auprès du bibliothécaire Alain Hees (04.67.55.06.14). [Louis Secondy]

Jean-Claude RICHARD RALITE : Carte archéologique de la Gaule, Hérault, Biterrois 34-5,

par Daniela Ugolini et Christian Olive, Paris, Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 2013

Avec ce volume de 635 pages se termine la Carte archéologique pour le département de l’Hérault qui est donc couvert par cinq volumes et qui offre une documentation exceptionnelle, depuis la Préhistoire jusqu’à la fin de l’Antiquité.

L’entreprise de cette Carte, commencée depuis longtemps par Michel Provost arrive à sa fin mais il est clair qu’elle ne marque qu’un moment de la recherche car fouilles et découvertes continuent d’avoir lieu dans les départements.

Chacun saura que les résultats sont dus aux actions des innombrables « amateurs » et à quelques professionnels de l’Université ou du CNRS, renforcés maintenant par les membres de l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives (INRAP). On regrette aujourd’hui la diminution de « grands » chantiers programmés, parfois sans fouilles depuis longtemps comme Ensérune qui tient la clé des problèmes posés entre Béziers et Narbonne : on ne comprend pas que des fouilles régulières ne soient assurées sur cet oppidum, qui appartient en totalité à l’État et qui dispose d’équipements techniques. Les publications des fouilles anciennes ne sont pas assurées, et on attend celle de plus de 200 tombes de la nécropole dont celles qui contiennent les restes de guerriers offrent une panoplie unique en France d’un armement exceptionnel.

D’autres chantiers de ce type sont interrompus ou en voie d’interruption ce qui ne laisse pas d’interpeller chercheurs et grand public sur l’avenir de l’archéologie française de terrain. Parfois, l’interruption est due au défaut de publications : les autorités archéologiques sont fondées à les exiger mais les difficultés et la lenteur de réalisation conduisent à la fermeture de sites pour plusieurs années…

Le département de l’Hérault grâce aux efforts de très nombreux chercheurs offre néanmoins un bilan très positif que les cinq volumes de la Carte archéologique confirment. [Jean-Claude Richard Ralite]

Jean-Claude RICHARD RALITE : Le Midi antique,
photographie et monuments historiques, 1840-1880, Arles, Snoeck éditions, 2014

Arles, Snoeck éditions, 2014

Le Musée d’Arles a présenté une exposition – avec le présent catalogue – de cent quarante photographies organisées en trois thématiques : « le monument en majesté », « la diffusion de l’image » et « l’approche archéologique ».

Nul n’ignore que les premières photographies datent du milieu du 19e siècle et que seuls les dessinateurs et peintres pouvaient transmettre une vision – leur vision – des monuments qu’ils rencontraient au cours de leurs voyages dans la France profonde. Dès lors, des photographes locaux ou venus d’ailleurs vont s’attacher de façon bénévole ou sur commande à réaliser la reproduction des monuments antiques du Sud de la France. L’action de la Commission Supérieure des Monuments Historiques fut décisive car il s’agissait de « vérifier » la fameuse liste de 1840 mais aussi de la compléter par de nouveaux classements pour lesquels les dossiers avaient, grâce aux photographies une « éloquence » prometteuse. Il y avait urgence car le Second Empire s’établissait aussi par de grands travaux qui pouvaient amener la destruction pure et simple de monuments qui devenaient des carrières. Arles, Fréjus, Nîmes, Orange, Carpentras, Cavaillon, Vaison, Saint-Rémy-de-Provence… La liste des photographes est vaste : les Baldus, Crespon, Mieusement, Nègre, Moitessier, Lenormand…et des anonymes seront très présents et vont marquer non seulement ce qu’ils représentent mais l’art photographique lui-même. Ultérieurement par les cartes postales tirées de ces œuvres ou avec l’arrivée de nouveaux artistes, les monuments du Midi continueront d’être mis en valeur mais on y ajoutera les monuments et les objets d’époques plus récentes.

Ce catalogue est particulièrement réussi et apporte une masse de renseignements sur le sujet et sur les photographes eux-mêmes. Les magnifiques reproductions donnent un état réel du passé antique tel que les habitants et les visiteurs du 19e siècle pouvaient le voir dans son environnement, avant que les grandes restaurations jusqu’à nos jours, donnent une véritable nouvelle vie à ce passé si prégnant dans le Sud de la France. [Jean-Claude Richard Ralite]

Jean-Claude RICHARD RALITE : Monastères et espace social

Il existe des ouvrages devant lesquels on ne sait ce qu’il faut en dire tant leur richesse scientifique s’impose, et dont on voit bien qu’il faudrait des pages et des pages pour être complet. C’est le cas des études réunies par Michel Lauwers sous le titre de : Monastères et espace social, genèse et transformation d’un système de lieux dans l’Occident Médiéval, Turnhout, Brépols, 2014, Collection d’Études Médiévales de Nice volume 15 (620 pages) avec la participation d’une vingtaine de collaborateurs.

Il s’agit d’étudier l’espace monastique c’est-à-dire le lieu ou complexe de lieux qui constituent un monastère, qui est un espace de culte, de vie, de production et de domination. Bien entendu les diverses Règles monastiques constituent une base de ces contributions car il ne s’agit pas d’archéologie et d’architecture mais de lieux vivants qui ont évolué à travers le temps et qui étaient perçus de façon diverse par leurs contemporains.

Derrière la clôture prennent place la porte, bien entendu l’oratoire (lieu ouvert ou fermé aux laïcs), le réfectoire, la cuisine, le cellier, le grenier, le four, le moulin, le dortoir, l’hôtellerie. On constate qu’entre tous ces lieux il existe une hiérarchie : le bourg juxtaposé ou enserrant le monastère avait des relations parfois fort complexes.

Si la prière est le cœur de la vie monastique, il existe toute une série de fonctions manuelles mais aussi intellectuelles qui constituaient le quotidien.

Les règles, les autres textes, les dessins, gravures, plans, les monastères encore actuellement dressés donnent des illustrations et permettent de voir comment s’organisaient les circulations, le cloître ne constituant que l’aspect le plus visible de celles-ci même si le cloître répondait à d’autres préoccupations.

Une suite de monographies de monastères à travers l’Europe nous fait entrer dans le vif des lieux avec une illustration de plans, photos en couleurs, particulièrement bienvenue. Pour notre région, on notera l’étude des représentations des pêcheries de Maguelone et de Saint-Gilles à partir de documents des XIVe et XVe siècles. Un regret : c’est celui de ne pas voir de contributions sur les monastères de la région, alors que documents et monuments ne manquent pas.

Il n’est pas inutile d’indiquer que ce bel ouvrage s’inscrit dans une recherche qui a déjà livré plusieurs volumes et articles qu’il convient de retenir car ils permettent à des lieux fermés d’être ouverts à nos contemporains plus facilement qu’ils pouvaient l’être, alors, à leurs habitants. [Jean-Claude Richard Ralite]

Jean-Claude RICHARD RALITE : Le Centre Jean Bérard de Naples

Fondé en 1966 par le regretté Georges Vallet sous le nom d’un universitaire qui avait consacré ses travaux à l’Italie du Sud et à la Sicile, le Centre Jean Bérard n’a cessé de se développer et constitue depuis 2010 une Unité mixte de recherche du CNRS. Il est un centre de documentation, de recherches archéologiques et historiques, de colloques et d’accueil pour des chercheurs. Il publié des monographies dont les trois dernières datent de 2013 et 2014.

D’un monde à l’autre, contacts et acculturation en Gaule méditerranéenne (n° 42, 2013) est un volume qui rassemble des articles de Michel Bats nommé directeur de cet établissement en 1991. Il sut donner une forte impulsion aux travaux habituels, mais aussi agrandir la « surface » internationale. Ses articles touchent bien sûr à l’Italie mais la Provence, le Languedoc et la Péninsule Ibérique sont très souvent au cœur des publications.

J.-P. Brun qui lui a succédé à la direction avant de l’abandonner pour le Collège de France, avec M. Leguilloux a livré un ouvrage sur Les installation artisanales romaines de Saepinum, tannerie et moulin hydraulique, (n° 43, 2014) faisant revivre une installation d’archéologie industrielle, domaine encore trop peu exploité par les antiquisants, mais duquel, déjà, en Provence, J.-P. Brun avait révélé les richesses. On y retrouve, pour le Haut Empire romain, des installations et des techniques qui, dans nos régions, ont surtout été étudiées du Moyen Age à l’époque contemporaine. Aujourd’hui les fouilles archéologiques de ces installations sont beaucoup plus précises qu’autrefois, et cet ouvrage mérite d’être connu de nos collègues français.

M. Mulliez a tiré de sa thèse un volume sur Le luxe de l’Imitation, les trompe-l’œil de la fin de la République romaine, mémoire des artisans de la couleur (n° 44, 2014). Il n’est pas utile de rappeler ce que le site de Pompéi a apporté à la connaissance de la peinture antique dont, ici, Narbonne, Arles… nous ont révélé les richesses et les capacités de leurs artisans. Aujourd’hui, il est possible d’effectuer des classements de style et de donner les cadres chronologiques. Le génie des peintres de l’Antiquité s’est exprimé dans tous les domaines et leurs œuvres nous permettent d’avoir des représentations d’architecture et de personnages qui, réellement, donnent vie au monde antique. [Jean-Claude Richard Ralite]

Jean-Claude RICHARD RALITE : Jansénistes de l’Hérault

Le Jansénisme dans l’Hérault a eu une diffusion importante dont Émile Appolis a tracé un certain nombre de pages de son histoire. Après la publication en 1640 de l’Augustinus de Jansénius commencèrent un certain nombre de péripéties avec, pour sommet, les évènements de Port Royal. Les persécutions qui suivirent engagèrent un certain nombre de Jansénistes à quitter la France et à se rendre, en particulier, aux Pays-Bas. Les archives mêmes de Port Royal furent transférées à la cure d’Utrecht, suivies d’autres archives françaises entre 1730 et 1740. Certaines archives regagnèrent la France à Troyes. Enfin, aux Pays Bas, elles aboutirent aux Archives Générales du Royaume où elles furent inventoriées par J. Bruggeman (1869-1956) et A.-J. Van de Ven : Inventaire des pièces d’archives françaises se rapportant à l’abbaye de Port Royal des Champs et son cercle et à la résistance contre la bulle Unigenitus et à l’appel (ancien fond d’Amersfoort), La Haye, 1972 (450 pages).

Cet Inventaire, très détaillé, est particulièrement précieux et fort peu connu des chercheurs (comme trop d’archives conservées à l’étranger et concernant la France et l’Hérault en particulier !). Il se termine par un Index des personnes (p. 319-412) et par un Index des noms de lieux (p. 413-450).

Voici le relevé des communes concernées de l’Hérault : Agde, Aniane, Baillargues, Béziers, Celleneuve, Combaillaux, Frontignan, Ganges, Lansargues, Lavérune, Lodève, Les Matelles, Montpellier, Mudaison, Pégairolles, Pézenas, St-André-de-Sangonis, Saint-Brès, St-Chinian, St-Clément, St-Guilhem, St-Pons, St-Seriès, St-Thibéry, St-Vincent-de-Barbeyrargues, Saussan, Vias, Villemagne.

Ces documents sont bien entendu liés à la vie religieuse avec les curés, les moines, les Évêques et ne présentent pas tous la même importance. Mais ils ne sauraient être négligés ! Il convient donc de penser à ces sources qui nécessairement complètent celles des archives de l’Hérault. [Jean-Claude Richard Ralite]

Jean-Claude RICHARD RALITE : Roger Hyvert (1901-1988) recenseur des Monuments Historiques de 1945 à 1965.

Pour tous ceux qui, à un moment ou un autre, se sont intéressés aux monuments, protégés ou non, d’une commune de notre région, le nom de Roger Hyvert est connu car, dans les cas les plus favorables, il existe un dossier constitué par ce modeste « artisan des monuments historiques ».

Recruté par la Conservation régionale des Monuments Historiques il va, peu à peu, de 1945 à 1965, réaliser les notices de plus de 800 édifices du Languedoc-Roussillon. Ces dossiers contiennent une notice, un ou des plans, une ou des photographies (qui vont être bientôt disponibles sur la base du Ministère de la Culture : (https://www.culture.gouv.fr/culture/inventaire/patrimoine) et chacun peut y trouver son bien.

Dans son dernier volume de 2014 la Société d’Études Scientifiques de l’Aude, sous la signature de Michèle François, a livré une biobibliographie de cet homme modeste et efficace qui va ainsi parcourir toute notre région et en constituer, avant l’Inventaire Général de la Cinquième République, un « musée » qui n’est pas imaginaire mais repose sur un œil et un esprit vif.

Il n’est pas inutile d’attirer ici l’attention sur les dossiers constitués depuis cinquante ans par l’Inventaire Général qu’il est possible de consulter auprès de ce Service du Conseil Régional ainsi que sur les côtes des Archives départementales qui peuvent contenir des documents originaux ou complémentaires. [Jean-Claude Richard Ralite]